Rallye de la Sarthe, 1ere épreuve du championnat de France, 7 et 8 Avril 2018 Notre rallye de la Sarthe 2018 : Duo Bernard père et fils #91

— article publié le : 24 avril 2018

 »Alors s’rallye ? Bien passé? T’as gagné? …..C’était ou déjà?  » Aaaaaaah , les questions du Lundi matin après un week-end de rallye… La réponse automatique vole jamais bien haut non plus :  »Ouais super bien passé merci, on a bien roulé, par contre y pleuvait mais pas de chute, blablablablabla…  »

Mais je vais te dire ce que ça a donné, parce que cette semaine, j’ai un peu de motivation pour ça. Avant tout, merci, mille fois merci à mon père qui me permet de faire tout ça avec sa moto! Et qui veux, en plus de ça, le partager avec moi . Merci aussi à ma mère Nathalie, à ma douce, Adeline, et à tous nos proches qui supportent notre passion. Big Up aussi à Jean-Christian pour le prêt du matos pour le R1 de William notre stagiaire du week-end et Clément pour ses coups de mains à préparer la meule de Will, et sa rapidité à modifier, fabriquer des pièces pour nos 2 motos.

 

Préparation, organisation…

Week-end précèdent le rallye, après 6 mois sans moto…

La saison 2018 a donc débutée le week-end du 7 – 8 Avril dans la Sarthe avec le premier rallye du championnat. On est arrivé sur place le Jeudi matin sous le soleil, bien préparé, mon père, mon pote Will et moi. Fort de près de 96, 5 km à moto depuis Octobre dernier , autant te dire qu’on arrivait avec la ferme intention et tous les ingrédients pour tout déchirer et remporter le rallye , toutes catégories confondues bien sûr! ( on avait prévu de faire 1 , et Will deuxième , pour son tout premier rallye).

LBLC  version de luxe!

Bon certes, en termes d’intendance, on était un peu limite… A la débrouille pour dormir, cuisiner, manger, se doucher dans notre minuscule fourgonnette à peine aménagée. Mais par contre, qu’on se le dise, un micro-onde, même tout neuf, ça remplacera jamais une maman!) Même pour se déplacer, faire les recos, les courses, on a du se dépatouiller avec une Twingo “RS” des années 90…

Dans le plus pur respect des traditions…

Oui parce que les traditions, tu le sais, ça se respecte, et nous, on blague pas avec ça! alors ce week-end là, on a entre autre respecté:

– De boire juste un apéritif le jeudi soir, puis deux, puis trois, puis “tu bois un coup?” puis un autre, puis “arrête de faire le con” , puis un verre, puis “ putin j’monte plus derrière toi” –STOP!!– “ on mange?” “ouais allé go on fait chauffer!” , “putin y’a plus de jus!! On boit un coup?”

Le R1 de Will, CONTROLE TECHNIQUE OK !

– L’instant de stress du copain qui débute , au moment de passer sa moto au contrôle technique.

-De découper et coller le roadbook le vendredi fin d’AM.

-De ne pas reconnaître le parcours routier (bah ouais, y’a un roadbook pour ça!)

De boire un apéritif le vendredi soir, puis un autre… –STOP!! — Manger un morceau loin du paddock, avec des gens de la vie de tous les jours, en prenant des nouvelles de nos loulous/femme/maman, sans trop parler de rallye.

De faire le plein des brèles à la station à 22H, en profitant de l’occase pour roder ses pneus sur le parking à la façon stunt…

La ou les traditions se sont perdues, et tant mieux c’est moins stressant, c’est qu’on a changé les pneus tôt dans la fin d’après-midi, après n’avoir consulté qu’une seule fois la météo (et pas météo paddock). Choix raisonnable et fidèle à nos principes, pneus typés routier/pluie (Michelin Road 4 avant arrière) en cas de doute de pluie. Et là, doute il y avait!

A la base, pas de stress, sauf que vendredi après-midi, après le briefing, on découvre notre ordre de départ, et la feuille qu’il m’impatientait de voir, celle de nos placements sur la grille du Circuit Bugatti. Je ne suis pas en fond de grille de la série 1 comme j’aurais aimé, mais en première ligne, en plein milieu de la piste série 2 !

Grille de départ série 2 :

Will est un peu plus loin en milieu de grille. Le semblant de stratégie de course que je m’étais fait tombe à l’eau et je dois bien t’avouer que c’est la gorge bien serré que j’ai appelé ma femme et les petiots en visio pour leur annoncer. Oui parce qu’en dehors du fait que cette position attribuée de manière aléatoire (qui aurait ravi un bon nombre de pilotes!) peut être un avantage pour celui qui a des watts, sait rouler sur piste mouillée, en pneus routiers, elle représente surtout énormément pour moi, non pas pour le demi pilote de rallye que je suis devenu, mais plutôt pour celui qui découvrait les grandes courses moto il y a maintenant 15 ans avec son frère et son père. C’est ici que j’ai découvert, au 24 heures du Man, la folie et l’émotion des courses, et là ou je suis devenu vraiment accro à tout cet univers. “Je pars au milieu, tout devant, certainement sur une piste mouillée, sans repères d’autres pilotes, avec 35 mecs qui voudront sûrement qu’une chose :  me dépasser!!”… Si je ne me suis pas répété 500 fois cette phrase jusqu’au Samedi matin 8h30…

Jour J :

Samedi matin, le départ est donné à 7h30, on est, comme les quelques 160 pilotes engagés, réveillé aux alentours des 6 h30, et là je peux te dire que j’en mène pas large, pas large du tout même, toujours cette phrase en tête pendant la rapide liaison qui nous amène au Circuit, et c’est pas en passant sous le panneau d’entrée 24 HEURES DU MANS que j’arrive à me détendre. En fait, sur la moto, devant un père plutôt silencieux et d’apparence calme, se trouve le gamin d’il y a 15 ans, les yeux qui brillent d’apercevoir ces grandes tribunes, ces paddocks et qui se souvient de l’effervescence qu’il peut y avoir dans ces lieux.

Pré grille :

Aujourd’hui évidemment, c’est beaucoup plus calme, chacun s’affaire à prendre une photo souvenir, à enlever le matériel inutile sur sa moto pour la piste. Nous, nous ne touchons rien, on ne se prend pas la tête à virer le lecteur de road-book, de toute façon, la brèle bloque à 225 km/h avec son bridage, alors la prise au vent… Le seul truc qu’il va me manquer, c’est mon père derrière moi pour pouvoir parler et partager, répartir un peu le stress !

On regarde la série 1 tourner, j’essaye d’être attentif à ce qu’ils font en virage, sur la remise des gaz, ce sera mon seul repère pour aborder le tour de reconnaissance dans lequel on s’engage quelque minutes après.

Un tour de reconnaissance donc, les yeux grands ouverts sur l’état de la piste, ses endroits plus humide, concentration aussi à essayer de ressentir comment la brèle réagit au freinage, à la mise sur l’angle…. S’en suit un tour de chauffe dans lequel je mets un peu plus de gaz avec quelques glisses à l’accélération mais rien de brutale, et pas de soucis sur le freinage, je freine surement beaucoup trop tôt et trop légèrement pour sentir quelconques mouvements, de l’avant en tout cas, mais ce qui me rassure un peu, c’est que je ne suis pas beaucoup doublé sur ce tour d’essai.

Mise en place sur la grille de départ, ça y’est, je suis à l’aise – impatient d’attaquer. En regardant devant moi il y a cette immense ligne droite, je fais totalement abstraction des autres, de ceux qui se trouvent derrière. Les sentiments et les émotions ne sont plus sous le casque, mais à quelques mètres, derrière la balustrade, ou mon père est là, à regarder son fils prendre le départ d’une course, en première ligne, sur le circuit du Mans pour le compte d’un rallye que nous vivons à deux. Pour moi, c’est ça le duo, ce partage la.

A l’extinction des feux je prends le meilleur départ et arrive en tête sous la passerelle Dunlop.

Et bien crois-moi ou pas, j’aurais bien pu me foutre la tronche par terre au virage de la chapelle juste après, et j’aurais quand même eu le sourire de l’avoir fait, et peu importe que ce soit des as de la piste ou des poireaux derrière moi, ce n’est pas important, dans ma course, pour ma pomme, j’ai fait un truc qui faisait rêver le gosse que j’étais, passer le premier sous la Dunlop pour une course!

J’arrive à rester concentré pendant les 3 tours qui suivent, je me fais doubler une première fois par un 750 GSX R que je n’arrive pas à tenir mais qui m’ouvre la voie sur quelques virages, puis plus tard, par une autre MT09. J’ai l’occasion de me retourner au niveau du Garage Vert et m’aperçoit qu’il n’y a personne dans ma roue, il me suffit maintenant d’assurer jusqu’à la ligne d’arrivée pour pouvoir savourer ce kiff d’avoir bouclé cette courte course sans encombres. Passage de la ligne d’arrivée en wheeling, ça c’est pour le côté détente et pour faire plaisir au père qui a dû lâcher lui aussi un sacré “YYESSSSSSSS!!!!!”

Bon évidemment, pour le tour de décélération c’est assez riche en émotion sous le casque parce que tout retombe, et comme tu sais maintenant que les traditions je les respecte, je suis stopper en rentrant au stand par un officiel du circuit qui me fait bien comprendre que faire des wheelings de partout sur le tour d’honneur, c’est pas une très bonne idée ! –STOP–

Le début du reste du rallye :

C’est lors d’un regroupement d’1h15 après le circuit que nous consultons les premiers résultats. Nous sommes classés 13ème pour l’épreuve sur circuit. Du tout bon ! Il va maintenant falloir boucler l’étape de jour sans problème sur les spéciales et on pourra enfin marquer nos premiers points au championnat, et peut être même en catégorie ELITE.

La route est sèche pour les 2 premières spéciales. C’est donc détendu qu’on a pu aborder les 4 spéciales de l’étape de jour. L’ES1 est une spéciale que j’ai déjà roulé il y a quelques années avec le 675 Daytona, Coulans sur Gée. En partant sur cette spéciale l’objectif est simple, arrivé en haut sans prendre trop de risque en appliquant ce qu’on avait à peu près définit en reco. Sur la seconde ES, Amné, même topo, on roule rythmé, quelques portions d’attaque mais sur les enchaînements rapides, j’en rends pas mal, peur du manque grip, de la terre, de sortir trop large, en fait peur de nous foutre par terre tout simplement.

Assez humide le reste du temps!

Ça se ressent d’ailleurs sur les chronos, mais c’est comme ça, on doit pas rouler au-dessus de nos pompes pour finir ce rallye qui s’annonce difficile avec les conditions climatiques et l’état des routes, et puis merde,” on est pas mal avec notre temps sur le Bugatti”, il s’agit pas de tout gâcher pour une poignée de secondes. Le premier duo est très clairement au-dessus, leur temps en spéciale sont hallucinants, ils sont intouchables. Derrière, près d’une minute nous sépare du 3ème. Pas de stress, il faut rouler, pointer à l’heure et naviguer au mieux. Bon on va quand même réussir à se paumer un peu en liaison sur des trucs à la con mais ça rajoute un peu de piment et ça rythme cette après-midi. Au final on pointe à l’heure de partout et au terme de l’étape de jour nous sommes 13ème/148 classés. Second duo, et surprise, second aussi en catégorie rallye 1. De quoi nous motiver à repartir pour l’étape de nuit. Will pour sa part en termine ici , il restera au sec pour la soirée, satisfait de son premier rallye mais refroidit par le temps qui tourne maintenant à la pluie assez intense et continue.

C’est sous une pluie battante qu’on prend le départ pour les 150 km de la deuxième étape. Le nouvel éclairage fourni par mon pote Clément fonctionne hyper bien et on se remet assez rapidement dans le ”bain”. Mon père continue à essayer de calculer les temps de pointage, ce qu’il ne faisait pas jusqu’à présent, et ça renforce encore un peu plus ”l’esprit d’équipe”, on navigue à deux, on parle beaucoup, il ne lit pas le road-book mais a une bonne mémoire des lieux, et me rappelle quelques fois à l’ordre à grand coup de “ t’es sûr de toi là??” ou de “poulailllllllerrrrrrrr” en spéciale, dans l’intercom. Sur le parcours il faut être assez attentif à toute les surprises que nous réservent les routes Sarthoise, en spéciale c’est la même chose, c’est détrempé, il y a de la terre, parfois même beaucoup de terre et en pleine trajectoire, alors on continue comme de jour, à rouler rythmé mais prudent, et ça donne une 20ème place scratch, 25 secondes derrière le premier duo qui a envoyé grave de nuit encore, et 25 secondes devant les 3ème.

On est bien, tintin!

A l’arrivée, évidemment nouvelle satisfaction pour mon père et moi. On en boucle un de plus en débutant comme il faut le championnat dans des conditions pas facile mais paradoxalement, même si on fait là notre meilleur place scratch sur les 4 rallyes effectués, on aurait bien volontiers rendu quelque places pour un temps meilleur et plus de plaisir à mettre du gros gaz.

Reste à croiser les doigts pour qu’au mois de Juin, pour notre rallye, à Cerdon, que nous ayons un  peu de chaleur et de soleil : la chaleur pour pouvoir monter la piscine dans le paddock comme l’année dernière et passer 3 jours de folie et le soleil pour s’assortir à la couleur de notre plaque numéro , qui serra jaune, synonyme d’élite, et de départ parmi les 20 meilleurs pilotes du championnat et ça, c’est une tradition qui revient, et que je suis fier de pouvoir partager avec mon coéquipier de père!

Classement final : 13ème scratch 2ème catégorie duo 2ème catégorie rallye 1